Peut-être qu’il nous faut transitionner de la causalité au sens. Pourquoi? Parce que le sens a une dimension éthique que la causalité n’a pas.
Le sens se distingue de la causalité par sa capacité à intégrer notre jugement. Ni pleinement objectif ni purement subjectif, le sens émerge dans l’espace où l’individuel et le collectif se rencontrent. Il fait sens pour nous lorsqu’il est partagé, tout en restant singulier lorsqu’il reflète notre propre expérience. Ainsi, le sens articule objectivité et subjectivité, permettant de naviguer entre ces deux pôles.
La subjectivité n’est pas un caprice : elle s’ancre dans un refus raisonné du sens commun, motivé par une aspiration à une vie plus juste, en opposition à ce que Hannah Arendt nommait la « banalité du mal » – la soumission aveugle à une rationalité ordinaire. Elle incarne le combat vital entre « sa raison de vivre » et la raison ordinaire quand celle-ci se fait complice du mal.
La causalité, en revanche, est instrumentale : elle justifie tous les moyens, y compris les plus discutables, pour atteindre une fin jugée souhaitable. Le sens, lui, ne sépare pas les moyens de la fin, ni la cause de l’effet. Cette indistinction est cruciale, car, comme l’illustre la théorie quantique, rien dans ce monde ne nous est étranger : tout effet dépend d’une mesure, et toute mesure nous est ultimement relative. En cela, Protagoras avait raison contre Platon lorsqu’il affirmait que « l’homme est la mesure de toute chose ». La théorie quantique, par son efficacité, confirme cette relativité et nous invite à repenser notre responsabilité dans la construction du sens.
Ainsi, privilégier le sens sur la causalité, c’est reconnaître que la vérité n’est pas une donnée absolue, mais un horizon façonné par notre engagement à donner un sens plus humain au monde.
PS : A ceux qui se demandent ce que vient faire ici le quantique, je suggère la lecture de Philosophie quantique, du philosophe des sciences Michel Bitbol.