Un jeu pour développer l’esprit de corps et surmonter les crises

Renvois : (clique pour déplier)
  1. Jeu de rôle sur table — Wikipédia ↩︎
  2. « Mais, sitôt que j’ai eu acquis quelques notions générales touchant la physique, et que, commençant à les éprouver en diverses difficultés particulières, j’ai remarqué jusques où elles peuvent conduire, et combien elles diffèrent des principes dont on s’est servi jusques à présent, j’ai cru que je ne pouvois les tenir cachées sans pécher grandement contre la loi qui nous oblige à procurer autant qu’il est en nous le bien général de tous les hommes : car elles m’ont fait voir qu’il est possible de parvenir à des connaissances qui soient fort utiles à la vie ; et qu’au lieu de cette philosophie spéculative qu’on enseigne dans les écoles, on en peut trouver une pratique, par laquelle, connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux, et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. Ce qui n’est pas seulement à désirer pour l’invention d’une infinité d’artifices, qui feraient qu’on jouirait sans aucune peine des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s’y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé, laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous les autres biens de cette vie ; car même l’esprit dépend si fort du tempérament et de la disposition des organes du corps, que, s’il est possible de trouver quelque moyen qui rende communément les hommes plus sages et plus habiles qu’ils n’ont été jusques ici, je crois que c’est dans la médecine qu’on doit le chercher. »René Descartes, Discours de la méthode. ↩︎
  3. L’élection de Donald Trump s’inscrit dans ce vaste mouvement. Ses slogans, parmi lesquels “Drill, baby, drill!” (Fore, chéri, fore!), sont ceux d’un homme d’affaires. A vrai dire, cela fait bien longtemps que nous obéissons à ce genre d’injonctions, à ces paroles sans âme, sur nos lieux de travail. Cela fait bien longtemps que nous “forons” notre tombe, que nous collaborons au saccage de notre belle planète, jusqu’à la rendre inhabitable au point d’envisager notre exil sur une terre aussi inhospitalière que l’est la planète Mars. ↩︎
  4. Avec un réseau d’une profondeur de 10, on peut toucher le monde entier :
    ↩︎
  5. Principe de subsidiarité selon lequel une autorité ne peut effectuer que les tâches et ne prendre que les décisions qui ne peuvent pas être réalisées et prises à l’échelon inférieur. J’ai pris connaissance pour la première fois de ce principe en lisant Small is beautiful – Une société à la mesure de l’homme, de E.F.Schumacher. ↩︎
  6. «Les hommes ne sauraient souhaiter rien de plus précieux pour la conservation de leur être que le fait de s’accorder tous en toutes choses, de telle sorte que les Esprits et les Corps de tous composent comme un seul Esprit et comme un seul Corps, afin que tous s’efforcent ensemble, autant qu’ils le peuvent, de conserver leur être, et recherchent ensemble l’utilité commune à tous. » Spinoza, L’Ethique (Scolie, Proposition 18, partie IV). ↩︎
  7. Spinoza en avait bien conscience. Il écrit dans l’Ethique : “Mais la puissance de l’homme est extrêmement limitée et infiniment surpassée par la puissance des causes extérieures. (…) Pourtant, nous supporterons d’une âme égale les évènement contraires à ce qu’exige le principe de notre utilité, si nous sommes conscients de nous êtes acquittés de notre tâche, si nous savons que notre puissance n’était pas suffisamment étendue pour nous permettre de les éviter, et si nous pensons que nous sommes une partie de cette Nature entière dont nous suivons l’ordre.» Spinoza, L’Ethique (Chapitre XXXII, partie IV). ↩︎
  8. Cf. Conscience cosmique, pour une écologie en première personne, Gérald Hess ↩︎
  9. Tranquillité d’âmes dont témoignent les membres des Alcooliques Anonymes (AA) devenus abstinents, eux dont la «Prière de la sérénité» ressemble étrangement à l’extrait de l’Ethique mentionné au renvoi n°6 :
    Mon Dieu, donnez-moi la sérénité
    d’accepter les choses que je ne peux changer,
    le courage de changer les choses que je peux,
    et la sagesse d’en connaître la différence.
    La sérénité des AA devenus abstinents ne tient pas du miracle. L’anthropologue Gregory Bateson avait noté combien les deux premières des 12 étapes de guérison des AA, à savoir :
    “- Nous avons admis que nous étions impuissants devant l’alcool – que nous avions perdu la maîtrise de notre vie.
    – Nous en sommes venus à croire qu’une puissance supérieure à nous-mêmes pouvait nous rendre la raison.”
    instituaient un autre rapport au monde, une complémentarité, que le monde bien-portant avait tort de négliger. Il écrit dans Vers une écologie de l’esprit, tome 1 : «De la combinaison de ces deux étapes, il résulte une idée extraordinaire et à mon sens correcte : à savoir que l’expérience de l’échec ne sert pas seulement à convaincre l’alcoolique qu’un changement est nécessaire, mais elle est elle-même la première étape de ce changement. Être vaincu par la bouteille et en être conscient constitue en ce sens une première “expérience spirituelle”. Le mythe de la maîtrise de soi du sujet est ainsi démoli par la mise en place d’un pouvoir supérieur.
    En somme, je dirais que la sobriété de l’alcoolique est caractérisée par une variante tout particulièrement catastrophique du dualisme cartésien : la division entre l’Esprit et la Matière ou, en l’occurence, entre volonté consciente ou “soi” (self) et le reste de la personnalité. Le coup de génie (du fondateur des AA) Bill W. fut de démolir la structuration de ce dualisme.»
    Bateson termine son étude sur l’alcoolisme par ces mots aux accents prophétiques : «Si nous continuons à opérer selon le dualisme cartésien : esprit contre matière, nous continuerons sans doute à percevoir le monde sous la forme d’autres dualismes encore : Dieu contre homme, élite contre peuple, race élue contre les autres, nation contre nation et, pour finir, homme contre environnement. Il est douteux qu’une espèce puisse survivre, qui possède à la fois une technologie avancée et cette étrange façon de concevoir le monde.» ↩︎
  10. Cf. Philosophie quantique – Le monde est-il extérieur?, Michel Bitbol ↩︎
  11. Spinoza précise ce qu’il entend par «science intuitive», qu’il prend soin de distinguer du savoir; il écrit au scolie 2 de la proposition 40 de la partie II de l’Ethique : «Trois nombres étant donnés, il s’agit d’en déterminer un quatrième qui soit au troisième comme le second au premier. (…) Soit, par exemple, les nombres 1, 2, 3 : il n’est personne qui ne voit que le quatrième nombre proportionnel est 6». Et en effet 2 est à 1 ce que 6 est à 3. On reconnaît là le principe de l’analogie qui nous incite au saut dans l’inconnu, avec tous les risques d’erreur que cela comporte, mais aussi toutes les créations que cela potentialise. ↩︎
  12. «L’image analogique se fonde, selon Saint Exupéry, sur sa faculté à former synthèse, à réunir les diverses parties d’un tout.» (Carnet I, 300). L’image analogique, ou poétique, fait sens bien qu’«il reste quelque chose d’inexpliqué dans cette conjugaison. Mais l’ensemble a été proposé comme logique à l’esprit, de même que deux images stéréoscopées, bien que dissemblables, ont été proposées comme représentant le même objet. L’esprit, pour rétablir cette identité crée l’espace (ou la perspective). Dans le cas de l’image poétique, pour établir, pour valider le lien logique il crée aussi un univers où ce lien est évident. Cet univers est total quoique non explicite. On ne sait même pas qu’il existe et pourtant on le subit. Ou, plus exactement, on subit une certaine attitude vis-à-vos de cet univers non formulé et qui n’existe là derrière que comme caution. On est renouvelé, on fait partie d’une certaine civilisation neuve.
    La valeur de l’image poétique est celle de cet univers latent et non celle des éléments ni de leur lien.
    Remarquons tout de suite que la logique n’a point de prise pour saisir et expliquer cette création. Elle ne commence précisément que là où finit la logique. Dans la mesure où la logique valide la structure prosée il n’y a point de création d’un univers. Là où la logique échoue déjà, commence la création.» (Carnet I, 309) ↩︎
  13. Jean-Pierre Lalloz, Qu’est-ce qu’une marque ? – PHILOSOPHIE-EN-LIGNE.COM ↩︎
  14. Jean-Pierre Lalloz, Notre sensibilité au vrai – PHILOSOPHIE-EN-LIGNE.COM ↩︎
  15. Jean-Pierre Lalloz, Qu’est-ce qu’un moment de vérité ? – PHILOSOPHIE-EN-LIGNE.COM ↩︎
  16. Le philosophe des sciences Michel Bitbol, pour évoquer la “participation au mouvement même du monde en gestation”, parle de morphopoièse (ou genèse poétique de la forme) : (76) Morphopoièse (ou genèse poétique de la forme) ↩︎
  17. «Une pensée spéculative cherchant à arraisonner l’absolu ressemble à une ombre qui s’efforcerait de saisir le corps dont elle est la projection, en courant devant lui.» Maintenant la finitude, Peut-on penser l’absolu? Michel Bitbol ↩︎
  18. «La signification profonde des fonctions Ψ de la mécanique quantique consiste non pas à décrire la propagation d’ondes à la «réalité» douteuse, mais à traduire formellement la relativité des phénomènes à prédire vis-à-vis de contextes expérimentaux parfois incompatibles.» Michel Bitbol, J.L. Destouches: Théories de la prévision et individualité. ↩︎
  19. A ceci près qu’il ne s’agit pas de contextes expérimentaux comme en physique mais de contextes cognitifs. ↩︎
  20. Hologramme — Wikipédia ↩︎
  21. Cette idée de personnages dévalant et colonisant le paysage symbolique à la façon de l’eau colonisant un delta pour y chercher le repos, ou de l’arbre colonisant le ciel pour y chercher la lumière, je la dois à Saint Exupéry et à son concept de “pesée” : « [L’eau] s’appuie contre les parois et attend les occasions. Car vient le jour où les occasions se montrent. Et l’eau nuit et jour inlassablement pèse. Elle est en sommeil en apparence et cependant vivante. Car à la moindre craquelure la voilà qui se met en marche, s’insinue, rencontre l’obstacle, tourne l’obstacle si c’est possible, et rentre en apparence dans son sommeil, si le chemin n’aboutit pas, jusqu’à la nouvelle craquelure qui ouvrira une autre route. Elle ne manque point l’occasion nouvelle. Et, par des voies indéchiffrables, que nul calculateur n’eût calculées, une simple pesée aura vidé le réservoir de vos provisions d’eau. » De cette pesée, il en tire une morale, «la morale de la pente» qui consiste à faire peser les hommes pour que, pareils à l’eau ou pareils aux feuilles de l’arbre, ils façonnent le chemin, le tronc commun qui les fera tous s’élever.
    Qui connaît un peu l’informatique quantique, et la logique qui lui est associée, fera le rapprochement entre la “pesée” et le parallélisme massif de l’ordinateur quantique. ↩︎
  22. Si les personnages partagent cette conviction, c’est parce qu’ils ont médité les paroles, parfois cryptiques, de personnages rencontrés durant le jeu, comme par exemple la physicienne Mioara Mugur-Schächter :
    « Ceux qui se sont attelés à la tâche de représenter les microsystèmes et leurs états d’une façon qui puisse être tolérée à la fois par l’essence de la mécanique newtonienne et par la théorie macroscopique des champs électromagnétiques, se sont trouvés confrontés à une situation cognitive qui, à l’époque, était sans doute inusuelle à un point tel que l’effort nécessaire d’innovation dépassait de loin les facultés d’une seule intelligence. Et même les capacités d’un seul génie. Mais d’autre part cette situation cognitive singulière imposait plus ou moins implicitement des restrictions tellement contraignantes que celles-ci ont agi comme un moule commun qui a assuré un grand degré d’unité entre les résultats des différentes approches. C’est la situation cognitive qui a orchestré la construction de la mécanique quantique. Placée sur un niveau supra individuel, intersubjectif, elle a remplacé d’une manière implicite le contrôle unificateur conceptuel-logique qui d’habitude fonctionne explicitement à l’intérieur d’un seul esprit novateur. Omniprésente d’une manière extérieure et neutre, elle a agi comme un organisateur et un co-ordinateur. (…) C’est la raison pour laquelle, jusqu’à ce jour, le formalisme quantique est ressenti comme si peu compréhensible, même par les physiciens et théoriciens qui l’ont longuement pratiqué et y ont réfléchi à fond. Parmi les fondateurs eux-mêmes, il serait difficile d’en trouver deux qui aient été entièrement d’accord sur les ‘significations’ incorporées dans le formalisme qu’ils ont contribué à créer. » Mioara Mugur-Schächter, L’Infra-mécanique quantique et examen critique du théorème de non localité de Bell – Principes d’une révolution de l’épistémologie révélés dans les descriptions de microétats. ↩︎
  23. «L’idée centrale est ici que les deux entités de la relation [en l’espèce ici, le joueur et le monde], situées dans un médium capable de vibration (un espace de résonance)[espace ici constitué des joueurs et du MJ], se touchent mutuellement de telle sorte qu’elles apparaissent comme deux entités qui se répondent l’une à l’autre tout en parlant de leur propre voix, autrement dit qui “retentissent en retour”. De ce fait, je l’ai dit, la résonance ne saurait se confondre avec les formes d’interaction (« linéaire ») causale ou instrumentale (entendue comme un couplage mécanique), dans lesquelles le contact, en tant qu’il est une influence imposée, produit un effet figé et prédictible. Pareil effet s’observe par exemple quand on fixe deux roues sur un même axe : la mise en mouvement de l’une entraînera automatiquement la mise en mouvement de l’autre. Il n’y a là aucun phénomène de résonance, puisqu’aucune vibration propre n’est alors suscitée. Telle est la raison pour laquelle la résonance doit être distinguée de l’écho, au sens propre comme au sens figuré : l’écho ne possède pas de voix propre, il survient pour ainsi dire mécaniquement et sans variation ; dans l’écho ne retentit que ce qui nous est propre, et non ce qui répond.» Hartmut Rosa, Résonance. ↩︎
  24. Michel Bitbol, Postface du livre de Gérald Hess, Conscience cosmique (pour une écologie en première personne). ↩︎